Présentation

Le 4 Janvier 1933, André Gide note dans son journal qu’il a les plus grandes difficultés à publier dans Les libres propos d’Alain et ajoute:
« Il me semble que le silence obstiné de cette petite revue, estimable entre toutes, est fait beaucoup d’une grande admiration pour mon oncle (de sorte que pour eux Gide, c’est Charles Gide, et qu’il ne doive point y en avoir d’autres que lui ) et comme mon oncle a eu, bien plus encore que moi, à souffrir d’un silence encore bien plus injuste, ce n’est pas de ce silence même que je me plaindrai »

Plus de trois-quarts de siècle ont passé et si le silence qui menaçait l’œuvre d’André Gide est définitivement brisé, celui qui entoure l’œuvre de son oncle demeure.

Ses titres pourtant ne sont pas minces : chef de L’Ecole de Nîmes, animateur des institutions coopératives françaises, dirigeant de l’Alliance coopérative internationale,  théoricien de l’économie sociale, Professeur d’économie à la Faculté de Droit de Paris, Professeur au Collège de France, Président du mouvement du Christianisme social, Vice-président de la Ligue des Droits de l’Homme…, il  s’est intéressé, au cours de sa longue vie, à d’innombrables aspects de l’évolution de la société française, de l’instauration de la République dans les années 1870 aux convulsions de l’entre-deux guerres.

Il a laissé une œuvre proprement monumentale – près de 4 000 écrits ont été, à ce jour, recensés – et certains de ses ouvrages économiques ont connu une diffusion qui laisse aujourd’hui songeur: ses Principes d’économie politique, par exemple, seront réédités 26 fois de son vivant en France et traduits en 19 langues. Mais à quelques exceptions près, cette œuvre immense n’a guère été connue à l’époque et est largement tombée dans l’oubli par la suite. Et le souvenir de Charles Gide  s’est progressivement estompé.

Il faut dire que ses théories, comme sa pratique, étaient fort peu en adéquation avec « l’esprit du temps ». Peu intéressé par la politique politicienne, il se passionnait pour des questions politiques et sociales concrètes et préférait mener des actions ponctuelles « à la base » en tentant de modifier le comportement des gens par l’enseignement et la pratique associative. Il a obstinément évité toute position de pouvoir qui aurait pu lui permettre de se faire valoir et de faire connaître ses thèses. Mettant constamment en avant une forte exigence morale, il a systématiquement refusé d’enrégimenter sa pensée dans un quelconque système et a manifesté envers les grands courants intellectuels de son époque un scepticisme ironique qui le mettait nettement à l’écart. Son extrême modestie s’accommodait parfaitement de cette position effacée et il n’a jamais rien fait pour tenter d’en sortir, préférant par exemple publier ses articles dans d’innombrables petites revues plutôt que dans les grands journaux nationaux, ce qui rendait difficile, même à son époque, de saisir l’intégralité de sa pensée.

Mais les raisons mêmes qui ont conduit le vingtième siècle, féru de grandes idéologies et de grands systèmes, à négliger la pensée de Charles Gide,  militent aujourd’hui en faveur de sa redécouverte. Pour contribuer à celle-ci, une réédition des ses principaux écrits est en cours. En cliquant sur les liens de gauche, vous trouverez sur ce site des informations sur cette réédition ainsi que différentes ressources sur la vie et l’œuvre de Charles Gide.